Sur les traces d'une culture vivante
Depuis les abords du Gibet de Montfaucon (place du colonel Fabien où trône le dôme qu'Oscar Niemeyer construisit pour le siège du Parti Communiste Français) - que François Villon, au XIII° siècle, chanta dans sa "Ballade du pendu" - on longe le mur des fermiers généraux (boulevard de la Villette) jusqu'à la Barrière de Belleville. Là, se dresse encore la Vielleuse, un des 2 cafés (Le Point du Jour a cédé la place en 1973, au siège de la CFDT) qui "formaient les piliers d'une entrée solennelle dans Belleville", village agricole et viticole, puis Commune autonome de 1790 à 1860 - date de son annexion à Paris. On entre dans la Courtille (rue de Belleville) dont la descente, au XVIII° siècle était un événement du Carnaval de Mardi-Gras. Après une escapade dans les ruelles alentours où les murs s'expriment librement, reflétant encore l'esprit engagé du quartier, on s'attable à la terrasse des Folies de Belleville, café très fréquenté depuis des siècles et dont l'annexe fut une salle de bal (qui accueillait les réunions de clubs révolutionnaires à l'époque de la Commune de Paris), un music-hall, un cinéma. On évoque le temps où ces nombreux lieux de plaisirs et de débats n'étaient pas encore des banques, des supérettes, des opticiens, des fast-food…
Et puis, on entreprend la montée de la rue de Belleville, que sa pente à 5,5% place dans le Top 10 des rues les plus pentues de Paris. On comprend pourquoi les bellevillois du XIX° siècle ont accueilli avec bonheur le funiculaire construit par Fulgence Bienvenue sur le modèle du Cable-car de San Fransisco (le seul qui ait existé à Paris). Installé dans le Funi, l'ouvrier apercevait la ribambelle de joyeux cafés, les réverbères inventés par leur concitoyen bellevillois Tourtille, l'usine à gaz de la rue Rébéval, la source d'eau sulfureuse qui alimentait l'Hôpital Saint-Louis, les nombreuses échoppes de cuir et d'habillement, le point de vue de la rue Piat sur tout Paris (que Willy Ronis photographia - aujourd'hui absorbée dans les Jardins de Belleville), le Théâtre de Belleville (où Melingue, Brasseur, Dullin firent leurs débuts dans des drames populaires avant de devenir de célèbres acteurs). Le Funi croise la rue des Pyrénées où tournaient les grands bras des moulins (et où habita Gustave Flourens, commandant la Garde Nationale bellevilloise - dernières barricades communardes en mai 1871) et arrive au Terminus de la rue du Jourdain, devant l'Eglise Saint-Jean-Baptiste-de-Belleville qui se dresse encore en face du bâtiment qui abrita l'ancienne mairie du village - elle-même installée dans une ancienne guinguette au nom évocateur de L'Ile d'Amour.
Derrière l'église, on descend la rue Fessart. C'est au n°24, dans une petite maison au médiocre bâti (comme toutes les bicoques du coin) qu'en 1912, Rirette Maîtrejean et Victor Kibaltchiche avaient installé le journal "l'anarchie" ; ils y vivaient aussi, et abritèrent les membres de la Bande à Bonnot (ce qui leur valu de nombreux déboires avec la Police et la Justice), car bien qu'en désaccord avec les méthodes illégalistes, leur porte restait loyalement et solidairement ouverte aux camarades anarchistes dans le besoin.
Au bout de la rue, nous entrons dans l'enceinte du Parc des Buttes-Chaumont, créé sur les carrières de gypse, par Adolphe Alphand, dans le cadre des travaux du Baron Haussmann, sous le Second Empire de Napoléon III. Ses 25 hectares en font le plus grand parc de Paris, mêlant plantations luxuriantes, monumentaux rochers artificiels, mobilier champêtre en trompe-l'œil, grottes abritant de très kitsch cascades, stalactites et faux ruisseaux. Dans les jardins, des pavillons accueillent encore des café. C'est autour d'un bon goûter que s'achève notre ballade, en fouinant dans la caisse des costumes qui habilleront les personnages de notre prochain spectacle.
A vous maintenant de tenter de retrouver les lieux cités, dans le diaporama ci-après : images d'aujourd'hui et d'hier - sur une chanson "made in Belleville", chantée par François Hadji-Lazaro. Merci à Blanche et Juana pour leur curiosité, leur entrain et leur joie.
LES BANDITS TRAGIQUES, de ODRI K. & D. LE GRALL
PEEP-SHOW DANS LES ALPES, de Markus KÖBELI
25 et 26 juin à Malakoff & 2 et 3 juillet à Châtillon
Quel plaisir de lire cette description drôle et savante à la fois! Et bravo aux jeunes compagnonnes pour leur enthousiasme! Hâte de voir les bandit-e-s sur scène :D
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